dimanche 21 septembre 2014

Dieu se laisse trouver

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Lecture biblique : Esaïe 55.6-9

Dans ce texte, on a un peu l'impression que Dieu joue à cache-cache avec nous. Il s'agit de le chercher, mais il est lointain tout en étant proche... Où est-il ? Comment le trouver ?

C'est surtout l'expression du verset 6 qui a attiré mon attention : le Seigneur « se laisse trouver ». Un peu comme quand un adulte joue à cache-cache avec un enfant : il se cache, mais pas trop. Il s'arrange pour que l'enfant arrive à le trouver.

C'est un peu comme ça que Dieu agit envers nous. Il se laisse trouver...


Un Dieu qui se laisse trouver 

« Cherchez le SEIGNEUR pendant qu’il se laisse trouver. » Est-ce à dire qu'il ne se laisse pas toujours trouver ? En réalité, on pourrait traduire différemment cette phrase. Il n'y a pas vraiment de préfixe temporel en hébreu, qui laisserait entendre que Dieu se laisserait trouver mais pour un temps seulement. Et après ce serait fini... 

D'ailleurs la Traduction Œcuménique de la Bible (TOB) propose : « Recherchez le SEIGNEUR puisqu'il se laisse trouver, appelez-le, puisqu'il est proche. »

L'idée n'est pas de dire qu'il faut le chercher maintenant parce qu'après il sera trop tard. L'affirmation est bien plus profonde. Elle touche à l'être-même de Dieu. Le fait de se laisser trouver, ou de se rendre proche, est dans la nature-même de Dieu. Le Seigneur est un Dieu qui se laisse trouver. Alors, cherchons-le !

Et il faut qu'il en soit ainsi. Parce qu'on ne peut pas trouver Dieu sans son aide. Il nous est inaccessible si nous ne comptons que sur nos propres forces, notre intelligence, notre sagesse ou notre connaissance. On ne le trouve pas par nous-mêmes, on le trouve parce qu'il se laisse trouver. 

C'est pourquoi dans les versets 8-9, Esaïe souligne la distance infinie qui nous sépare de Dieu. 

Le SEIGNEUR déclare :
« Vos pensées ne sont pas mes pensées,
mes façons de faire ne sont pas les vôtres.
Il y a une grande distance
entre mes façons de faire et les vôtres,
entre mes pensées et vos pensées.
Elle est aussi grande
que la distance entre le ciel et la terre. »

Si on n'avait que ces versets, on dirait « laisse tomber... ». Comment connaître un Dieu si différent, si éloigné de nous ? La réponse est au verset 6 : parce qu'il se laisse trouver ! 

Voilà ce qui est extraordinaire dans la révélation biblique. Ce Dieu infini, tout-puissant, créateur de l'univers entier, ce Dieu plus grand que tout ce qu'on peut imaginer, ce Dieu qui, par nature, nous est si éloigné, nous petites poussières dans l'univers, créatures limitées et souvent pitoyables, ce Dieu-là se laisse trouver par nous, il se rend proche de nous. 

Toute l'histoire de la révélation, c'est l'histoire d'un Dieu infini et inaccessible qui se rend proche de nous, accessible. Il laisse des traces de sa présence dans la Création, au plus profond de notre conscience. Il se révèle à travers les prophètes qu'il a choisi. Et, comme couronnement de cette révélation, il y a l'incarnation, la venue du Fils de Dieu devenu homme. Il ne peut pas se faire plus proche de nous... 

La formule d'Esaïe est belle : Dieu se laisser trouver. Dieu se révèle mais sans s'imposer. Il s'approche de nous mais sans nous contraindre. Il appelle mais il ne nous force pas la main. Il se laisse trouver...


Trouver Dieu pour se retrouver soi-même

Chercher Dieu, comme nous y invite le prophète, implique bien plus qu'une quête religieuse ou philosophique. Il y a un autre appel qui lui est lié, au verset 7. Un appel à la repentance :

Les gens mauvais
doivent abandonner leur conduite.
Celui qui fait le mal
doit abandonner ses pensées méchantes.
Tous doivent revenir vers le SEIGNEUR,
car il aura pitié d'eux.
Tous doivent revenir vers notre Dieu,
car il pardonne généreusement.

La repentance, c'est un changement radical, qui trouve sa source dans le retour à Dieu. Cet appel au retour à Dieu intervient au cœur de la promesse d'un autre retour, celui du peuple dans son pays, après l'Exil. C'est ici utile de rappeler que les prophéties bibliques ne sont pas de simples prédictions d'un avenir déjà écrit. Elles sont l'occasion de rappeler le projet de Dieu mais aussi d'inviter les lecteurs à y entrer avec foi. Les promesses, ou les avertissements, s'accompagnent toujours d'un appel. 

Dans le message des prophètes, le plus important des retours n'est pas le retour de l'Exil à Babylone, c'est le retour à Dieu. Tout comme le départ en exil du peuple était présenté par les prophètes comme une conséquence de l'infidélité à Dieu, la promesse du retour en Canaan implique un appel à un retour à Dieu. Et c'est là que les écrits prophétiques revêtent un caractère universel.

Nous ne sommes pas dans la situation des Juifs en exil à Babylone mais à travers les siècles, l'appel du prophète parvient jusqu'à nous. N'avons pas aussi besoin de revenir à Dieu ? Si Dieu nous paraît silencieux et lointain, n'est-ce pas souvent parce que nous nous sommes nous-mêmes éloignés de lui ? 

Du coup, la thématique du retour à Dieu éclaire d'un jour nouveau le verset 6. Le Dieu qui se laisse trouver est aussi le Dieu qui accueille toujours celui qui revient à lui. Le pardon qu'il offre permet d'envisager tous les recommencements. Le Dieu qui aura pitié est celui qui se laisse toujours trouver... et retrouver. Le Dieu qui pardonne généreusement est celui qui est tout proche, prêt à nous accueillir. 

Alors, il faut bien le souligner, le vrai retour à Dieu implique des changements. Il s'agit d'abandonner certaines conduites et certaines pensées. Cela ne peut être sans une remise en question. C'est la nature même de la repentance biblique qui n'est pas simplement un regret ou un remord mais une décision ferme de changer, de se laisser changer par Dieu. 

La repentance, le retour à Dieu, est le moyen d'être libéré de ce qui est mauvais en nous. C'est le chemin qui nous conduit à nos racines oubliées, celles de l'image de Dieu en nous. Une image brouillée, déformée, par le péché.  

Le retour à Dieu est la source d'un retour à soi-même. Trouver, ou retrouver Dieu, c'est se retrouver soi-même : homme, femme, créé à l'image de Dieu.


Conclusion

« Cherchez le Seigneur puisqu'il se laisse trouver,
Faites appel à lui, puisqu'il est proche. »

Il y a dans cette phrase un appel et une promesse. L'appel, c'est de sans cesse chercher le Seigneur. Nous en avons tous besoin, parce que loin de lui, nous dépérissons, nous perdons notre humanité-à-l'image-de-Dieu. Nous devons le trouver pour nous retrouver nous-mêmes !

La promesse, c'est que Dieu se laisse trouver, qu'il se rend accessible. Nous sommes pourtant infiniment loin de lui mais toute la révélation biblique nous parle de ce Dieu qui se rend proche et accessible, jusqu'à devenir l'un des nôtres, en Jésus-Christ. 

Ces paroles du prophètes étaient précieuses pour les Juifs exilés à Babylone, au VIe siècle avant Jésus-Christ. Elles peuvent l'être aussi pour nous aujourd'hui, qui avons tout autant besoin d'entendre cet appel et cette promesse.

Cherchez le Seigneur : il se laisse trouver !

dimanche 7 septembre 2014

Les vertus théologales (3) L'amour

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Après la foi et l'espérance, voici, l'amour ! Enfin ! 

Un mot souvent galvaudé, enrobé de mièvrerie ou souillé par de sombres histoires. D'ailleurs dans certaines versions de la Bible, on a préféré traduire par « charité ». Un mot qui a, lui aussi, ses connotations pas forcément positives... 

Mais la perspective biblique sur l'amour est bien plus large que le sentiment amoureux. L'amour, dans la Bible, concerne toutes nos relations. Et cela est bien exprimé par les deux commandements que Jésus cite comme étant les plus importants, et indissociables l'un de l'autre : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toute ton âme, de toute ta force et de toute ta pensée. » et « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »

Pour percevoir cette large perspective, le mieux est encore de lire ce qui est sans doute un des plus beaux textes bibliques sur l'amour, et qui se termine par le verset qui est à l'origine de notre mini-série sur les trois vertus théologales : 1 Corinthiens 13. Un texte qu'on aurait bien tort de limiter aux seules cérémonies de mariage ! Un texte qu'on ferait bien aussi de ne pas réduire aux seuls versets 4-7, certes magnifiques. Il vaut même la peine de commencer la lecture avec le dernier verset du chapitre précédent.

Lecture biblique : 1 Corinthiens 12.31-13.13

Nous avons commencé la lecture avec le dernier verset du chapitre précédent parce qu'il donne le ton de la suite : « Mais maintenant, je vais vous montrer un chemin meilleur que les autres. ». La conclusion du chapitre répond à cette introduction : « Maintenant, trois choses sont toujours là : la foi, l'espérance et l'amour. Mais la plus grande des trois, c'est l'amour. » (v.13)

En quoi le chemin de l'amour est-il le meilleur ? En quoi l'amour est-il plus grand que la foi et l'espérance ? 


Sans l'amour, la foi n'est que du blabla

Aux versets 1-3, Paul commence pas évoquer les pratiques spirituelles dont il a parlé au chapitre précédent. Et les exemples évoqués sont quand même impressionnants : parler la langue des hommes et la langue des anges ; parler au nom de Dieu, comprendre tous les mystères et posséder toute la connaissance ; avoir une foi assez grande pour déplacer les montagnes. Et il ajoute même des exemples de consécration étonnants : distribuer toutes ses richesses à ceux qui ont faim, livrer son corps au feu. Ce n'est quand même pas rien...

Mais toutes les manifestations de foi, même les plus spectaculaires, toutes les preuves de générosité et de consécration, ne valent rien s'il n'y a pas l'amour. Sans l'amour, la foi n'est rien de plus que du blabla, toute piété est sans valeur. 

En réalité, l'amour est le sceau qui authentifie la foi et l'espérance. Une foi confessée sans amour est une contrefaçon. Si on prétend être animé d'une espérance sans être animé d'amour, on se trompe soi-même et on trompe les autres. 
Le chemin de l'amour est non seulement le meilleur mais il est le seul valable, le seul que nous devions emprunter en tant que croyant. Les autres sont des impasses ou des chemins qui se perdent. 


Un chemin difficile vers l'amour parfait

Nous en arrivons aux fameux versets 4-7 où Paul associe à l'amour différents qualificatifs. Il parle ici plus spécifiquement de l'amour envers le prochain. Quelle est la différence entre cette liste de qualificatifs et la liste d'exemples des premiers versets ? Ici, rien de spectaculaire : la patience, l'esprit de service, l'humilité, le pardon... Pourtant, que c'est difficile ! Surtout lorsque les qualificatifs ne sont pas pris séparément mais ensemble, comme un tout. 

Qui oserait dire, en lisant ces verset : « C'est tout moi ! Voilà mon portrait craché ! » ?

On l'a dit, ces versets sont souvent lus lors des cérémonies de mariage. Et c'est évident qu'ils peuvent s'appliquer à la vie de couple. Mais pourquoi les y limiter ? Le commandement de Dieu concerne toutes nos relations : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ! » Est-ce que ces versets qualifient vraiment la façon dont nous sommes en relation avec notre prochain ? 

Est-ce que j'ai de telles relations avec mes frères et sœurs dans l’Église ? L'amour rend service... l'amour ne cherche pas son propre intérêt... l'amour ne se souvient pas du mal... l'amour supporte tout... 

Est-ce que j'ai de telles relations avec ceux que je côtoie dans ma vie de tous les jours ? 
L'amour est patient... l'amour n'est pas jaloux... l'amour ne se met pas en colère... l'amour espère tout...

Et n'oublions pas que Jésus a dit qu'il nous fallait aller jusqu'à aimer... nos ennemis ! Comme lui-même en a donné l'exemple. Jésus nous précède sur ce chemin de l'amour, il est notre modèle, notre guide vers l'amour parfait. Meilleur chemin, l'amour est sans doute aussi le plus difficile, le plus exigeant. Celui sur lequel on ne peut pas avancer sans l'aide de Dieu, sans la force de son Esprit.


L'amour est éternel

Enfin, l'amour est le plus grand parce que l'amour est éternel. Et ce n'est pas là une affirmation romantique à l'eau-de-rose... Comme le dit le verset 8, « l'amour ne disparaît jamais. » Alors que la foi et l'espérance, oui. La foi, l'espérance et l'amour nous relient à Dieu aujourd'hui. Mais la foi et l'espérance passeront. Pas l'amour. C'est ce qui, pour l'éternité, nous relie à Dieu. 

Paul le souligne, notre vie de foi est partielle, incomplète, notre connaissance est limitée. Aujourd'hui, nous voyons avec les yeux de l'espérance, de façon imparfaite, comme dans un miroir. Dans l'Antiquité, les miroirs étaient faits de métal poli et n'offraient qu'un reflet flou et déformé. Lorsque notre espérance sera accomplie, dans la présence même de Dieu, nous n'auront plus besoin de croire ni d'espérer ce que nous verrons ! Mais l'amour demeurera. Il sera même plus fort que jamais. 

Voilà pourquoi l'amour est le plus grand. Aimer, c'est déjà goûter un peu du fruit de notre espérance. C'est permettre à Dieu de corriger les imperfections de notre foi. 


Conclusion

La foi, l'espérance et l'amour sont les vertus qui qualifient notre relation à Dieu aujourd'hui. Mais il n'en sera pas toujours ainsi. La foi et l'espérance disparaîtront lorsque nous verrons Dieu face-à-face. L'amour par contre demeurera toujours. Voilà pourquoi l'amour est le plus grand.

En attendant, les trois sont aujourd'hui indissociables. L'amour est le sceau qui authentifie la foi et l'espérance. Il ne peut y avoir de véritable foi et de vraie espérance sans l'amour. L'amour pour Dieu et l'amour pour le prochain. Voilà pourquoi l'amour est le chemin le meilleur.