dimanche 30 mars 2014

Un corps qui ne doit pas perdre la tête

Lecture : Colossiens 1.15-20

Ces versets constituent un hymne à la gloire du Christ. Peut-être s'agissait-il d'un texte liturgique existant par ailleurs, que Paul aurait inséré dans sa lettre, à la suite de sa prière d'action de grâce et avant une exhortation. De toute façon, ces versets forment un tout cohérent d'une grande richesse théologique.

En examinant le texte original grec, deux parties semblent apparaître clairement. La première (v.15-18a) centrée sur l'oeuvre de création associée au Christ, la deuxième (v.18b-20) centrée sur son œuvre de réconciliation.

Au cœur de cet hymne, le verset 18 apparaît presque comme un intrus, sans lien évident avec les versets précédents : « C'est lui qui est la tête du corps, c'est-à-dire de l’Église ». Mais c'est une affirmation qui se justifie pleinement, notamment pour le propos de l'apôtre. L’Église, c'est ce qui nous relie au Christ dans cet hymne. L’Église c'est nous, l'ensemble de ceux qui appartiennent au Christ, les croyants de tous les temps et de partout. Et nous sommes le corps dont le Christ est la tête. Ce qui est dit du Christ ici nous concerne en tant que corps du Christ.

Il est l'image du Dieu invisible, c'est en lui et par lui que tout a été créé, ce qu'on voit et ce qu'on ne voit pas, le monde matériel, le monde spirituel, l'univers entier... La tête, l'autorité, le chef de l’Église, c'est ce Christ-là ! Ça nous dit bien quelque chose de l’Église...

Et puis le Christ n'est pas seulement à l'origine de tout le monde créé, il est aussi celui par qui le monde est sauvé. Par lui, Dieu est venu parmi nous faire œuvre de réconciliation. Il est venu sauver ce monde qui s'est écarté de son Créateur. Au passage, remarquez comme Paul souligne la dimension cosmique de l'oeuvre de salut de Dieu : elle concerne l'ensemble de la création, « sur la terre et dans le ciel »... L’Église n'est, finalement, qu'une petite parcelle de cette œuvre de réconciliation.

On comprend pourquoi, par cette vision grandiose du Christ, il est essentiel que l’Église soit un corps qui ne perde pas la tête !


1. Une tête universelle

La dimension universelle du Christ et la dimension cosmique de son œuvre nous poussent à une compréhension universelle de l’Église. Dans l'Apocalypse, la vision du « peuple innombrable », sans nul doute symbole de l’Église, nous est décrit comme un peuple issu « de tous les pays, de toutes les tribus, de tous les peuples et de toutes les langues. » (Ap 7.9). Le projet de Dieu pour son Église est universel.

Cela implique, évidemment, le refus de tout replis sectaire. Comment prétendre croire à une Église universelle si nous pensons être les seuls à détenir la vérité ? Le seul fait de penser « détenir » la vérité est suspect. Du point de vue des évangiles, la vérité, c'est la personne du Christ, pas une confession de foi...

Pour avoir une vision correcte de l’Église, il faut nécessairement élargir notre regard bien au-delà de « son » Église locale ! Et pas seulement en théorie... Mais en profitant des occasions qui se présentent pour rencontrer d'autres Églises, prier avec d'autres chrétiens. C'est incohérent de dire : « Oui, je crois à l’Église universelle... mais je ne m'intéresse qu'à mon Église locale ! » L'oecuménisme, dans le sens de la communion dans la diversité de l’Église universelle n'est pas une option. Ce devrait être une composante essentielle de notre vie de chrétien.

Mais il y a aussi l'accueil de la diversité interne de l’Église, comme une expression locale de l’universalité de l’Église. Rien n'est plus contraire au projet de Dieu pour son Église qu'une communauté complètement uniforme où tout le monde marche droit, au même rythme, dans une discipline de fer. Ça, c'est l'armée. Pas l’Église...


2. La tête, c'est le chef ! 

La métaphore du Christ comme tête du corps affirme l'autorité suprême du Christ sur son Église. Une autorité ici magnifiée par l'ensemble de l'hymne et son évocation glorieuse de la personne du Christ.

C'est, du coup, une mise en garde contre toute autorité humaine qui voudrait un tant soit peu prendre la place de la tête... Dans l’Église, l'autorité n'appartient pas au pasteur, ou au conseil, ou aux membres les plus anciens, ou à celui qui parle le plus fort ou prie le plus longtemps. L'autorité, c'est le Christ et sa Parole. Toute autre autorité dans l’Église est relative et subordonnée au Christ. Comme il est triste que si souvent, dans les Églises, il y ait tant de jeux de pouvoirs... A force de jeux de pouvoirs, il y a des Églises qui finissent pas se couper la tête... en se coupant de l'autorité du Christ.

C'est lui, le Christ, qui est le chef ! Et ça doit se voir. Le Christ doit être omniprésent, au cœur de la vie de l’Église. Sans cette centralité du Christ, nous ne sommes plus une Église... tout au plus une association cultuelle, une amicale de chrétiens.

Comment se manifeste, concrètement, la centralité du Christ dans l’Église ? Peut-être d'abord à la place qu'il occupe dans nos motivations et nos objectifs.
- Pourquoi venir au culte ou assister aux différentes réunions ? Pour rencontrer des amis ou même recharger ses batteries spirituelles ? Non.. d'abord pour rencontrer le Christ !
- Pourquoi louer Dieu, chanter et prier ? Pour passer un bon moment, se faire du bien, vivre une expérience intense ? Non... pour glorifier le Christ !
- Pourquoi annoncer l’Évangile ? Pour faire grandir l’Église, remplir les chaises vides, pouvoir se mesurer aux autres Églises ? Non... Pour glorifier le Christ, seul Sauveur du monde !


3. Une seule idée en tête : la réconciliation

L'accent porté, dans la deuxième moitié de notre texte, sur l'oeuvre de réconciliation du Christ a forcément une incidence sur notre compréhension de l’Église. Affirmer que le Christ est la tête de l’Église, c'est affirmer qu'il est à l'oeuvre dans son Église. Et que son objectif, la seule idée que Dieu a en tête, c'est la réconciliation. La réconciliation avec Dieu, bien-sûr, mais sans doute aussi la réconciliation les uns avec les autres.

L’Église est une communauté de rachetés, des hommes et des femmes pardonnés et déclarés justes par la mort du Christ, réconciliés avec Dieu. Une communauté d'hommes et de femmes « saints, purs et sans faute. » (v.22). Du moins aux yeux de Dieu ! Parce qu'on est assez loin de ça dans la réalité. Mais même avec nos faiblesses, nos sales caractères, nos cœurs pas toujours purs, nos motivations pas toujours saintes, nous nous présentons devant un Dieu qui nous accueille comme si nous étions saints, purs et sans faute.

Dieu ne nous voit pas tels que nous sommes vraiment mais tel que nous sommes en Christ. On pourrait dire, tel que nous serons lorsque l'oeuvre du Christ en nous sera pleinement accomplie. Il ne voit pas d'abord nos failles, nos limites et nos erreurs. Il voit notre potentiel pleinement révélé par l'oeuvre du Christ.

Du coup, je me demande : et nous ? Quel regard portons-nous les uns sur les autres ? Est-ce que nous voyons notre frères, notre sœur, tels qu'ils sont aujourd'hui ou tels qu'ils peuvent devenir en Christ ? Est-ce que nous leur donnons la chance de changer, ou plutôt d'être changés par le Christ, ou les enfermons-nous dans des cases, des chaînes, par un regard de jugement ?

Et si nous sommes une communauté de réconciliés avec Dieu, vivons-nous la réconciliation entre nous ? Ou nous accommodons-nous de vivre avec des rancœurs, des conflits, des ressentiments envers notre frère ou notre sœur ?


Conclusion

L'Église est un corps qui ne doit pas perdre la tête. Le Christ est son chef, et ça doit se voir. En ce qui concerne l’Église universelle, pas de risque : le Seigneur lui-même s'en occupe. Mais pour les Églises locales, l'exhortation doit être prise au sérieux.

D'autant que, malheureusement, l'histoire de l’Église est pleine d'exemples où les Églises ont perdu la tête, devenant un corps sans tête, ou un monstre à plusieurs têtes.

Jésus-Christ est l'unique chef de l’Église. Comment pourrait-il en être autrement :

« Il est le commencement,
celui qui, le premier, s'est levé de la mort,
pour être le premier de tous, toujours et pa
rtout. »

dimanche 16 mars 2014

Va, sur ton propre chemin !

Lecture biblique : Genèse 12.1-8

On surnomme Abraham le père des croyants. Son histoire dans la Genèse raconte son cheminement vers une foi totale en Dieu, depuis l'appel reçu à Ur en Chaldée jusqu'au mont Moriya où il était prêt à offrir son fils Isaac en sacrifice. Ces récits ont valeur d'exemple et font de la figure d'Abraham une sorte de prototype du croyant, dont nous pouvons tirer des enseignements pour notre propre cheminement de foi.

L'appel de Dieu commence avec une formule étonnante : en hébreu, lekh lekha. Littéralement : « va pour toi » ou « va vers toi ». Il y a eu de nombreuses interprétation de cette formule, plus ou moins psychanalytiques... D'autres préfèrent simplement y voir une formule intensive, qu'on pourrait traduire « Va, quant à toi... ». Qu'en est-il ?

On retrouvera la même formule au chapitre 22, quand Dieu dira à Abraham d'aller offrir son fils Isaac en sacrifice. Au moment où, au premier abord, la promesse elle-même de Dieu semble être remise en cause : comment Abraham pourra-t-il être père d'une grande nation s'il doit tuer son fils ? Forcément, la formule fait référence à l'appel initial d'Abraham.

D'autant que la formule est extrêmement rare dans la Bible et qu'on ne la retrouve qu'une seule autre fois dans l'Ancien Testament, cette fois au pluriel, en Josué 22.4. C'est un contexte différent mais qui a quand même quelques similitudes. C'est Josué qui envoie les tribus qui avaient choisis de rester en Transjordanie, pour qu'ils aillent s'y installer, après avoir aidé leurs frères des autres tribus dans la conquête de Canaan. L'idée est bien aussi celle d'aller sur leur propre chemin, en lien avec un appel et une promesse.

Bref, lekh lekha ne peut être perçu simplement comme une formule intensive. Sa rareté et l'usage de la formule à deux moments cruciaux de la vie d'Abraham nous invitent à aller plus loin... Il y a bien ici un appel à une mise en marche particulière, un appel à la foi qu'on pourrait exprimer ainsi : « Va, sur ton propre chemin ! ». Ça s'accorde du reste avec la suite du verset où il est question pour Abraham de quitter son pays et sa famille. Bref, d'emprunter son propre chemin.

Chacun son chemin

Dieu adresse à Abraham un appel personnel qui le met en marche « pour soi ». Le chemin de foi ne peut être qu'un chemin propre à chacun. Parce que la foi n'est pas héritée, même si elle peut naître dans un terreau plus ou moins favorable. Elle est toujours un chemin personnel, que nul ne peut emprunter à notre place.

Autrement dit, le verbe croire se conjugue toujours à la première personne. Même si ça peut être la première personne du singulier ou du pluriel ! La foi, c'est toujours « Je crois » et « Nous croyons ». Ça n'est pas le « tu crois » ou plutôt « tu dois croire » inquisiteur et légaliste qui veut dicter aux autres ce qu'ils doivent croire et comment ils doivent croire. Ce n'est pas plus le « il croit » ou pire le « on croit » impersonnel. Celui d'un discours distant sur la foi, d'une analyse froide et abstraite.

La foi, c'est toujours le « je crois » personnel. Celui de ma vie de disciple de Jésus-Christ, l'expression de ma relation avec le Christ. Elle fait partie intégrante de ma vie. Elle m'appartient. Elle fait partie de mon intimité, de mon identité.

Mais la foi, c'est aussi le « nous croyons » communautaire. D'ailleurs l'appel d'Abraham, s'il est personnel, a aussi une dimension communautaire : « je ferai de toi un grand peuple ». Chacun son chemin, oui. Parce qu'on ne peut pas marcher à ma place. Mais pas chacun pour soi ! Nous ne sommes pas seuls sur le chemin. Nous le partageons avec les autres « marcheurs ».

Une Église est une communauté de marcheurs. Nous devons nous considérer les uns les autres comme des compagnons de route, des disciples en marche à la suite du Christ.

Aller, c'est quitter

Abraham, pour répondre à l'appel de Dieu, a dû quitter « son pays, sa famille et la maison de son père ». Et il avait 75 ans... Ce n'était pas un petit jeune qui partait de chez papa et maman pour aller à l'aventure !

L'appel à la foi reçu par Abraham l'oblige à changer de vie, en quittant ce qui faisait sa vie jusqu'alors : ses origines, sa culture, ses racines. Aller, c'est quitter... La foi est un chemin de renoncement, pas de confort. Et c'est vrai non seulement au début de notre vie chrétienne mais aussi tout au long du chemin. Si elle nous met en marche, la foi nous garde aussi toujours en mouvement. S’arrêter, s’installer, se contenter de ses acquis, c’est déjà quitter le chemin !

La foi n'est jamais un chemin de confort... Ou alors, c'est qu'on met notre foi en péril. Car la routine, la tiédeur, le confort sont des dangers pour la foi, au moins autant que les épreuves ou la persécution.

Mais rapidement, le confort peut refaire surface, de multiples façons. Le confort d'une vie chrétienne routinière, avec ses habitudes rassurantes, avec le cocon tiède d'une vie d'Eglise pépère, la tranquillité d'une vie de disciple du Christ anonyme, avançant toujours à couvert sans trop se mouiller. Ou alors, le confort aliénant d'un légalisme qui rythme la vie par une liste d'interdits et d'obligations, le confort intellectuel d'un croyant qui croit avoir tout compris et qui n'a donc plus besoin de se remettre en cause...

Quelles sont les zones de confort dans notre vie chrétienne que nous devrions quitter ?

En marche vers l'inconnu...

Quand il part, Abraham sait ce qu'il quitte, mais il ne sait pas où il va ! « Va dans le pays que je te montrerai ». Il ne sait pas encore quel sera ce pays !

C'est là que s'exprime la foi dans sa dimension de confiance. Abraham doit faire confiance à Dieu quand il lui dit qu'il va lui montrer un pays. Il n'a aucun plan de route précis, il ne connaît même pas le but de son voyage. C'est en route que les choses se préciseront. Dieu renouvellera et précisera sa promesse à plusieurs reprises. Et le voyage d'Abraham sera tout sauf une croisière paisible sur un long fleuve tranquille. La route sera émaillée d'épreuves, d'imprévus, de choix malheureux...

L'exemple d'Abraham nous rappelle que pour répondre à l'appel de Dieu, il n'y a pas besoin d'avoir tout compris ! C'est toujours vrai aujourd'hui ! Il s'agit d'abord de choisir de faire confiance à Dieu et de s'engager sur le chemin... en route vers l'inconnu.

Pour répondre à l'appel de Dieu, que ce soit au début de notre vie chrétienne ou plus tard, n'attendons pas d'avoir toutes les cartes en main. Le risque zéro n'existe pas... même dans la vie chrétienne ! Et si on attend assis sur notre chaise (même si c'est pour prier !) que tout soit clair, confirmé et reconfirmé avant de répondre... on risque bien de rester assis longtemps ! C'est bien en souvent lorsque nous nous sommes levés et mis en marche que les projets de Dieu pour nous se précisent.

Ça signifie aussi qu'on ne peut pas attendre des nouveaux convertis, ou de ceux qui sont en chemin vers Dieu, qu'ils aient dès le début une théologie parfaitement orthodoxe. On ne peut pas plus attendre d'eux qu'ils aient une conduite parfaite... ou plutôt qu'ils se fondent dans le moule du bon-chrétien-vraiment-converti-et-ça-doit-se-voir ! Il suffit de lire la suite de l'histoire d'Abraham pour se rendre compte qu'il était encore loin d'être le croyant parfait et irréprochable...

Conclusion

« Va, sur ton propre chemin ! » C'est un peu ce que le Seigneur dit à Abraham dans notre texte. Va, quitte ton pays, prend le risque de me faire confiance. J'ai des promesses en réserve pour toi.

Le Seigneur nous dit la même chose aujourd'hui. Va, sur ton propre chemin. Ne te contente pas du chemin déjà parcouru. Va plus loin. Quitte tes zones de confort pour découvrir les promesses que Dieu a en réserve pour toi.

Nous en sommes tous là... Nous sommes des marcheurs de la foi : chacun son cheminement, mais ensemble sur le chemin.

dimanche 2 mars 2014

Un Dieu tendre et fidèle... comme un mère

Lecture biblique : Esaïe 49.14-16

Nous sommes dans le contexte de l'exil à Babylone. Le peuple de Juda est loin de son pays, déporté loin du pays de la promesse. Il y a forcément chez eux un sentiment d'abandon, de désespoir : Dieu a jugé son peuple, il l'a abandonné.

Mais Dieu répond par le biais de son prophète et veut rassurer son peuple. Non, il ne l'a ni oublié ni abandonné. Et pour l'exprimer, il utilise un langage imagé très fort... et surprenant. Il compare Dieu à une mère allaitant son bébé, une mère qui ne peut oublier son enfant. « Même si elle l'oubliait, moi je ne t'oublierai jamais. »


Dieu est aussi notre mère !

Arrêtons-nous sur cette métaphore étonnante de Dieu sous la forme d'une mère. Quand on y pense, c'est surprenant... pour un Dieu qu'on a l'habitude d'appeler Père !

L'image traditionnelle de Dieu, ce serait plutôt celle d'un vieillard à la barbe blanche... Toute caricaturale qu'elle soit, elle peut véhiculer l'idée de sagesse et d'éternité. Mais à en croire Esaïe, l'image d'une mère allaitant son bébé est tout aussi pertinente pour évoquer Dieu.

Ca me fait penser au roman, bestseller paru il y a quelques années, de Paul Young : « La Cabane ». Dans ce livre, un homme rencontre Dieu dans une cabane, ou plutôt la Trinité, sous une forme corporelle inhabituelle : le Père est une femme afro-américaine, le Fils un homme du Moyen-Orient et le Saint-Esprit une petite femme asiatique. C'est un roman, pas un ouvrage théologique... Et même si ce n'est pas un chef d'oeuvre de la littérature, j'ai bien aimé ce livre qui apporte une lumière originale sur la question de la Trinité. N'en déplaise à tous ceux qui ont tiré à boulets rouges sur son auteur, accusé d'hérésie !

En tout cas, il y a quand même quelques textes dans la Bible, dont celui d'Esaïe, qui troublent l'image traditionnelle, et paternaliste, de Dieu. Et c'est tant mieux ! Dieu n'est pas, à proprement parlé, masculin ou féminin. Ou alors, d'une certaine façon, il est les deux. N'oublions pas que dans la Genèse, c'est en tant qu'homme et femme que l'être humain a été créé à l'image de Dieu...

Dieu est toujours plus grand, plus complexe que ce que nous pouvons en dire. Tout ce que nous pouvons savoir sur Dieu est forcément partiel. Comment pourrait-il en être autrement d'un être infini ? Permettez-moi de vous le dire : vous ne savez rien ! Vous n'avez rien compris... ou si peu ! Mais c'est normal... moi aussi !

Laissons-nous donc simplement interpeller par cette métaphore de Dieu comme une mère. Elle souligne deux attributs de Dieu : la tendresse et la fidélité.


La tendresse de Dieu

« Est-ce qu'une femme oublie
le bébé qu'elle allaite ?
Est-ce qu'elle cesse de montrer sa tendresse
à l'enfant qu'elle
 a porté ? »

L'amour de Dieu est comparé à la tendresse d'une mère pour son enfant. Une image incroyablement intime. Et de fait, quand la Bible parle de manière imagée de l'amour de Dieu, elle prend des métaphores très intimes : l'amour d'un père ou d'une mère pour ses enfants ou l'amour d'un mari pour sa femme...

Notre compréhension de l'amour de Dieu ne doit pas se contenter de bons sentiments, pour le « bon Dieu » qui-aime-tout-le-monde-et-qui-pardonne-à-tout-le-monde. Dans l'histoire biblique, l'amour de Dieu s'est manifesté dans des actes concrets : la promesse d'une descendance à Abraham, la sortie d'Egypte des Hébreux, l'entrée dans le pays promis, le retour après l'exil et, bien-sûr, la venue du Fils de Dieu sur terre.

L'amour de Dieu pour nous est un amour vrai et authentique, qui ouvre sur une relation personnelle et intime avec lui. L'amour de Dieu est protéiforme. Ici, c'est son aspect tendre qui est souligné. Voilà qui donne l'image d'un Dieu réconfortant, consolateur, rassurant. L'image nous pousse à une intimité avec Dieu. A nous mettre dans la position du bébé qui allaite dans les bras de sa mère : le bonheur absolu pour un bébé !


La fidélité de Dieu

« Même si elle l'oubliait,
moi je ne t'oublierai jamais.
Vois, j'ai écrit ton nom
sur la paume de mes mains.
Je pense sans arrêt à tes mu
rs de défense. »

Dans des conditions normales, une mère n'abandonne pas son enfant, elle ne l'oublie jamais. Malheureusement, on sait que cela peut arriver... Alors Dieu va plus loin. Il envisage même cette possibilité pour dire que lui, ne le fera jamais. La fidélité de Dieu est sans faille.

Le peuple de Juda était pourtant en droit de se le demander. Rappelons qu'ils sont en exil, déportés du pays que Dieu leur avait promis. Bon, ils en étaient responsables, de par leur infidélité à Dieu. Et dans l'affirmation du verset 14, il n'y a pas forcément de reproche. Peut-être simplement un constat amer : « Le SEIGNEUR m'a abandonnée, mon maître m'a oubliée. » Sous-entendu : « on l'a bien mérité ! »

Mais Dieu n'est pas de cet avis. Il a encore des projets en réserve pour son peuple, parce que même s'ils sont infidèles, lui reste fidèle. Et à l'image du peuple d'Israël dans la Bible, nos vies sont faites aussi d'infidélités, d'oublis du Seigneur et de mauvais choix avec des conséquences parfois néfastes. Nous aussi nous pouvons nous dire parfois : « Le SEIGNEUR m'a abandonné, mon maître m'a oublié. » Et même ajouter : « je l'ai bien mérité ! »

Mais la promesse demeure : « Je ne t'oublierai jamais ». D'autant qu'elle a été renouvelée par Jésus : la parabole dite de l'enfant prodigue ne dit pas autre chose !

Si Dieu est fidèle, c'est parce qu'il nous aime. Comme le père de l'enfant prodigue, comme la mère qui s'occupe de son bébé. C'est parce qu'il s'est engagé par alliance avec nous. Le baptême est un signe que Jésus nous a laissé pour être signe de cette alliance. Un signe que nous posons au début de notre vie chrétienne, pour ne pas oublier. Pour se souvenir aussi que Dieu n'oubliera jamais. Témoin de notre engagement, il s'engage à nos côtés.


Conclusion

En guise de conclusion, je terminerai avec une exhortation :

Ne vous enfermez pas dans vos certitudes sur Dieu et laissez-vous surprendre par lui, à travers la Bible. Recherchez sa présence comme le bébé recherche la présence de sa mère, et vivez de sa tendresse et sa fidélité.